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Il y a le soleil, et rien d'autre.

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J'ai presque fini de traduire (pour moi, traduction de travail comme on dit ahah) The Love Book de Lenore Kandel et non seulement j'ai envie d'écrire comme elle (j'ai déjà tâtonné) mais je pleure devant ses poèmes plus que jamais (si beaux !)
Ces états d'exaltation me rendent presque malade mais je sens que je ne vis que lorsque je les ressens.
(J'ai été dans une telle émotion euphorique que j'en ai eu la nausée en juillet. Presque vomir de bonheur, comme c'est curieux !)
Et tout le reste du temps : travailler, faire la cuisine, etc où je ne vis pas. (Oui, Anaïs Nin disait la même chose).
Je sais aujourd'hui (ô mes désirs fluctuants) que tout ce qu'il y a de mondain dans la vie ne m'intéresse pas, ne m'intéresse plus. Prendre des verres dans des bars, partir en voyage, "gagner sa vie", décorer sa maison, se distraire de toutes les manières possibles : rien de tout ça ne m'intéresse (sinon comme expérience poétique, et encore). Toutes ces années passées dans des désirs erronés en pensant qu'il fallait désirer ce que les autres désiraient.
Alors que mon envie de me consacrer à une vie "spirituelle" (le mot est beaucoup trop pompeux), disons intérieure ou émerveillée ou partiellement ascétique et très probablement érémitique est présente depuis longtemps en moi. J'étais amère mais il y avait des bourgeons d'émerveillement et maintenant que tout, tout, tout fleurit : que je me rende à la grâce que je sens (que je suis).
Dans une vie dénuée d'artifice : à se donner toute entière aux feuilles des arbres et aux feux du ciel. à la vie, à la vie, à la vie. à la sève et au désir.
(Comme j'étouffe de ne pas vivre dans cette vie là !)
Non, je n'ai aucun pragmatisme : je resplendis. Transmutation poétique de tout. Je ne suis qu'un instrument à métamorphose et c'est tant, c'est tant.
I am but a character of Blue of Noon.

Ma bibliothèque est brisée en deux, je ne peux pas prendre tous les livres que je voudrais à chaque fois que je change d'endroit. J'ai laissé Le Bleu du ciel, et ce livre me manque terriblement depuis hier. (Pourtant j'ai peu le temps de relire).
De ces livres que j'aimerais toujours avoir avec moi... c'est comme la lettre de Černá : un déchirement de la savoir loin de moi. (Heureusement, le bouquin est si petit qu'il se transporte partout).

Je suis Le Bleu du ciel, c'est terrible. De l'extase à la nuit aux étoiles à l'irréalité à l'érotisme macabre et solaire. Ce roman que tout le monde ne peut pas lire : ce roman comme une lame de rasoir, ce roman que j'ai voulu partager et qui n'a pas été aimé, qu'une personne trop sensible n'a pas pu lire davantage parce qu'elle y était trop réceptive (comme moi mais c'est la matière dont je suis faite donc j'ai l'habitude).
Et qu'importe l'histoire : ce roman émotionnel, excessif, intérieur, désespéré, lumineux, cruel, magnifique, et surtout si juste, si juste. (Mais Bataille a la justesse de mes sensations).

En romançant, je pourrais aussi dire que Le Coupable m'a sauvé la vie... Alors la place qu'a Bataille dans mon existence.
Je suis si illuminée qu'il me faut relire ces livres. D'une autre perspective. J'y verrais toute cette lumière, éblouissement...
Ma vue a encore baissé et je me demande pourquoi ça s'est "autant" dégradé en 2 ans alors que ça semblait se stabiliser avant. Mais bon je suis encore jeune, donc ça évolue...
J'ai retrouvé une ordonnance de quand j'avais 14 ans et j'avais déjà -3,25 à l'oeil droit. J'ai toujours eu une grande différence entre les deux yeux (aujourd'hui je suis toujours deux fois moins myope de l'autre oeil), je me demande si, enfant, j'avais pas commencé à délaisser l'oeil qui voyait rien sans le savoir.

Avant je me reposais beaucoup sur ma vue, mais depuis je vis dans une sorte de semi flou permanent où je distingue les choses plutôt que d'essayer de les voir avec netteté. Ça explique peut-être pourquoi je laisse plus de place à l'odorat. (L'ouïe est sans doute toujours le sens sur lequel je m'appuie le plus.)
Je trouve vraiment pénible l'astigmatisme, c'est ça qui me plonge dans l'imprécision totale. J'ai l'impression d'avoir oublié ce que c'est que de voir des choses avec des contours nets, c'est comme si tous les coloriages de la réalité avaient débordé de partout. Sauf que c'est imperceptible, on sent juste qu'il y a quelque chose qui ne va pas mais on ne sait pas quoi.
(Pour moi qui lit énormément, c'est affreux, et en même temps on ne fait que reconnaître et pas lire les mots en général donc bon. Vivement que je change mes verres).
Je suis obligée de lire Cent ans de solitude et il y a un personnage, Remedios-la-belle, qui me fascine : je rêverais d'être comme elle. Pas pour sa beauté, mais pour sa "simplicité", sa spontanéité et son naturel à faire les choses que son corps ressent plutôt que de vivre selon des règles qui lui sont étrangères. Pas parce qu'elle est "divinisée" (même si !) mais passer toute la journée à se baigner, à attendre d'avoir faim pour manger, à faire des choses toutes simples, quel bonheur ce doit être. Être si indifférente au monde conventionnel !

Fascination infinie pour son "excentricité" qui la fait passer pour une simple d'esprit. Qu'elle passe des semaines entières à vivre "en décalé" par rapport aux autres dans la mesure où elle ne mange que quand elle est a faim... et pas à heures fixes !
Elle aurait voulu se promener nue parce qu'elle ne voit pas l'intérêt des vêtements ; mais comme on l'a obligé, elle porte un unique vêtement simple à enfiler, pratique.
Fascinante... !
Je l'attends, mais à quoi bon, puisque je ne supporte pas l'attente ? Puisque l'on ne se doit rien ? Rien.
Ce n'est qu'une chimère et un hasard et une obsession. (J'ai été si heureuse !) (Dans l'absence, le monde s'est écroulé).
Être raisonnable m'ennuie terriblement. Travailler en plein août. Parier sur une vie qui ne m'intéresse pas. Pourtant, c'est ce que j'ai voulu, non ? Je sais ce que je fais ces trois prochaines années. Je suis tellement agacée par ces livres à ficher, les manuels de grammaire à avaler, le latin, etc. Je cherche une porte de sortie mais c'est peut-être un refus d'être raisonnable, refus d'être adulte. Tout le monde travaille et personne n'en fait tout un foin.
La merveille n'était que pathologique. Ou elle était pathologique et reste merveilleuse, à voir...
Je supprime tout ce que j'ai écrit sur un autre site (flemme immense de le faire ici, ce serait trop long, j'avais déjà essayé...) : une confirmation que je suis complètement cinglée. Complètement cinglée.
Mais tant que je ne fais de mal à personne, c'est ok.

(Cette croyance un peu absurde que si je supprime tout, ça ira mieux. Que je recommencerais de zéro.)
J'écris, naturellement, pour sublimer la douleur, pour qu'elle soit supportable,
J'écris, surtout, pour être aimée,
mais ça ne fonctionne pas, ça ne fonctionne pas,
j'écris pour être lue, pour combler la solitude, pour attirer la pitié, pour mendier de l'amour,
j'écris pour qu'on m'aime - quelle idiotie
j'écris pour quelqu'un, j'écris pour qu'il m'aime, je lui donnerais tous mes poèmes
j'écris pour quelque chose qui n'est pas possible : je ne suis pas aimable. L'écriture ne sert pas à être aimée. ça n'a de toute façon jamais marché. Je suis restée seule.
Je les ai regardé m'aimer - mais ça ne marche pas, non. Je donnerais n'importe quoi, je donnerais mon corps puisque ce n'est que ça qu'ils veulent : juste pour avoir l'impression d'être aimée
L'écriture n'a jamais servie qu'à vouloir être aimée : mais il faut arrêter d'écrire puisque ça ne marche pas, puisque après, c'est pire,
il faut arrêter d'écrire, partir dans un ashram (ça ou mourir), arrêter mes études littéraires, arrêter la littérature, jeter mes livres, faire place nette. Il faut jeter les livres, l'écriture et les mots.
Douleur immense au ventre. Peur de m'évanouir.
J'ai mangé trop vite parce que j'avais faim. J'ai pris un dessert alors que j'avais déjà mal au ventre. Devenir un trou, manger comme elle.
Ce qui ne m'arrivera jamais, mon corps est un supplice en ce qui concerne l'ingestion.
J'ai trop mangé parce que j'avais la tête qui tourne de faim. Ce qui m'arrive tous les jours. Presque. Je voudrais m'allonger, fermer les yeux : je ne peux pas.
Je lis Pizarnik en me tordant de douleur : je n'ai pas moins mal qu'elle.
Mais peut-être que la tristesse et la rage se muent en douleur. (Je la lis, j'écris comme elle). Elle a raison, je ressens certains de ses mots comme des crocs plantés dans mes bras.
A la fin du mois d'août, j'aurais les cheveux tachés de rouge : bonheur.
"J'ai découvert par grand hasard et sans croire beaucoup à l'astrologie, que le 21 novembre précisément, jour de mon anniversaire, notre terre sort de l'influence du Scorpion pour entrer dans celle du Sagittaire"
Je suis tombée sur cette citation et JE suis née un 21 novembre donc ça m'a intriguée, mais elle a été écrite par Gide (dons son Journal) sauf qu'il est écrit partout qu'il est né le 22 alors je suis confuse. (Je suis scorpion ascendant sagittaire d'ailleurs)
Je viens d'enregistrer un poème que j'ai lu à voix haute, comme dans le temps, et ma langue trébuche beaucoup moins, alors c'est plus facile, plus plaisant à enregistrer pour moi.
J'écoute ma voix et oui, elle me paraît étrange, mais pas étrangère, parce que je la reconnais (je me reconnais) à ma manière chaotique de lire, à briser le rythme des phrases, à tirer en longueur certains mots et en manger d'autres, à baisser et hausser la voix tour à tour, sans aucun respect de la ponctuation, au rythme des battements de mon cœur, de ma timidité qui monte jusqu'à mes lèvres.
(Et qu'on me dise encore que la langue française n'a pas d'accentuation particulière, à moi qui la chante, qui la cahote.)
Mais je continuer de penser que je dois être une très mauvaise lectrice, on ne doit rien comprendre ! Je ne "mets pas le ton" au bon endroit. Je ne remarque souvent la ponctuation qu'après avoir lu et je comprends peu ce que je lis parce que je suis trop préoccupée par ma voix (voire mes gestes), mon auditoire. (De toute façon dès qu'il est question d'un tiers je perds mes moyens...)
La première carte de mon nouveau tarot que j'ai tirée est le diable - j'aime bien l'idée.
Je viens de retomber sur cette phrase de V. que j'avais noté : "Je like tous tes messages, c'est un peu comme surligner tout le texte dans le livre" - qu'est-ce que ça me fait rire.
Je crois que ce qui me fait rire, c'est aussi que ce n'est pas du tout mon vocabulaire, et la surprise ne manque jamais de me faire rire. On n'était pas du même monde (j'ai envie d'écrire "on était mal assorties" mais ça ne veut rien dire) !
Et parfois je me rappelle qu'elle a développé des idées politiques atroces et je ne regrette rien. Jusqu'ici c'est le grand amour de ma vie et ma grande tragédie ahah.

("Elle est adorable et si dictatrice" c'est magnifique).
Il y a quelques mois, A. m'a écrit "avec toi les mots sont plus forts que la réalité". Dans ma tête, ce sont des mots gravés en lettres d'or.
J. vient de me dire que mes mots lui procuraient des impressions très fortes, qu'il les sentait quasi physiquement.

Ce sont des compliments très beaux, qui me touchent au coeur.
Cette "puissance" ou cette "intensité" que je porte, je ne la perçois pas toujours. Moi-même je suis très impressionnée par les mots, ceux des écrivains, ceux des autres qui me façonnent.
La littérature, mon paradis...

Kundera est mort et ma tristesse est incertaine. La littérature tchèque est ma littérature de travail, alors je pense à lui, qui reste sans aucun doute l'écrivain tchèque le plus connu en France (évidement). Mais il a quitté cette langue qui m'attire pour le français. Mais ses romans me laissent pensives, ses romans que je lis dans les trains, ses romans qui ont le sens de la formule mais pas de la beauté...
Mes parents m'ont dit que je ne faisais pas de caprice et que je ne boudais pas non plus quand j'étais enfant. J'étais même sage et facile à vivre. Bizarre. J'étais persuadée que j'avais été une enfant insupportable - et je ne peux vraiment pas croire que je n'étais pas boudeuse. (Mais je n'ai presque aucun souvenirs).
D'un autre côté j'ai la sensation qu'ils me donnaient tout et à l'inverse que j'avais peur donc je ne demandais pas grand chose. Et de toute façon, j'ai clairement été habituée à supporter et à me taire. Et à faire semblant - paraître profondément neutre, ne jamais laisser transparaître mes idées et mes pensées profondes.
Je me demande ce que je ressentirais si je pouvais aimer un (des) être(s) humain(s) comme j'aime le vent, l'orage, les euphorbes et n'importe quoi. C'est l'extase. Je déborde d'amour, je déborde de désir et même la canicule me fait pleurer parce que je la ressens dans mon corps et elle est belle, elle est grandiose, elle est. C'est renversant, cette beauté du monde : je manque presque de mots et ne peux pas y croire. Je voudrais tout exprimer. (C'est une prière).
Deux choses : je suis heureuse ou j'ai touché dieu. Mais je ne suis pas religieuse pour un sou, seulement le vocabulaire religieux m'engorge la bouche. Oui, je sens le divin, je suis divinisée. Jana Černá parlerait plutôt de grâce (milost) et pour moi, je ne fais pas de différence entre cette grâce, le divin, le bonheur et l'être...
Cet amour est sans mesure, c'est un abandon allègre, offrir son être tout entier... et, oh j'en pleurerais presque (pas de joie, cette fois), c'est ça qui coince : quelle tranquillité ce doit être de pouvoir s'abandonner tout entier (toute entière) à quelqu'un. Ou ne serait-ce que devant quelqu'un.
Mais l'être humain, c'est la peur totale, une obscurité immobile qui nappe mes bras, dégouline, s'engouffre dans mes yeux, dans mon nez, dans ma bouche. J'étouffe. L'amour est une lente asphyxie, une atrophie progressive de mes muscles, de mes pensées, de mes sentiments. Je veux partir, un grand bol d'air de solitude, vite, sentir l'air circuler à nouveau dans mes poumons, le soleil couler dans mes yeux, dans ma gorge, tout ce miel qui remplace doucement mes veines (non, plus de sang qui gicle fantasmatiquement). Je revis, je vis, quel bonheur inespéré que d'être en vie, quelle délicatesse, quelle grâce... À cette pensée les larmes coulent : comme la vie me paraît belle (comme elle est belle après l'enfer). J'ai ce désir immense, qui gonfle ma poitrine, de célébrer la vie. (Et si cette célébration, cette émotion devant tout pouvait se propager... !)
Devant tout ? Mais non, la faille est là... Qui disait avoir peur de ne plus voir la beauté des êtres à force de voir la beauté des choses ? C'est bien ce qui pourrait m'arriver. Et par compensation, je pense aussi qu'il y a une merveille dans les êtres humains, mais je doute d'être capable de la ressentir. Cela ne prend qu'une forme intellectuelle... Oui, je passe à côté de la beauté de gens, connaître ou donner la grâce par/à quelqu'un. Voilà pourquoi je me demande ce que ce serait... avec un air rêveur, un soupir léger ; mais pour tout le reste, la beauté est dans mes yeux et c'est une véritable félicité.
(Ce n'est qu'une question d'histoire personnelle, je me figure assez bien ressembler à un animal maltraité qui ne peut approcher personne - ou que personne ne peut approcher -, mais vivre seule est un véritable baume, et n'est-ce pas assez que d'y avoir trouvé le bonheur ?)
Ma mère me fatigue ! (D'ailleurs, je [re]vis depuis que je n'habite plus avec elle, c'est un vrai soulagement).
Elle a pas compris le principe de bloquer les gens, je crois. Elle a trouvé un moyen de voir quand même les sms bloqués... et depuis elle les vérifie et du coup elle est perturbée et elle est insupportable. Quand elle a commencé à me saouler, je lui ai dit direct qu'elle était pas censée voir ces sms, qu'elle serait plus tranquille, puisque de toute façon ça vient d'une personne malveillante. Elle est incapable de s'en foutre, ça me rend dingue !
De même, je ne comprends pas pourquoi elle continue de spéculer sur l'héritage de son père alors qu'elle peut rien savoir de plus que ce que les notaires etc. lui disent. C'est officiel, ça se fera, elle saura les choses, je vois pas à quoi ça sert de me poser des questions toute la journée : j'en sais rien et je peux pas savoir. Et c'est hyper pénible au bout d'un moment... Et je comprends pas ce qu'elle essaie de comprendre dans le fait que son père ait essayé de la déshériter au maximum. C'était une personne violente et malintentionnée, il y a strictement rien à comprendre de plus. (Et de toute façon quand on sait qu'elle l'a jamais revu et quand je l'entends dire qu'elle souhaitait sa mort : ça suffit à comprendre non ?)
J'ai commencé a attirer des hommes qui ont une imagination puissante - parce que je sais jouer avec les images. Surtout, je sais jouer avec leurs images. Moi-même, j'ai peu d'imagination, mais je me sers de ce qu'ils me disent pour créer. (Par moments, je sais me caler sur leur rythme - il le faut, ils me coupent, ils entravent mes envolées lyriques et mes délires abstraits : ils me fragmentent et me halètent).
La réflexion rompue, ma tête se brise, je me raccroche à ce qui passe, à ce que je vois, à ce que je ressens, c'est-à-dire aux symboles. Je pars à la dérive : ma tête s'ouvre en deux. Abstractions. Images. On ne comprend rien, mais ceux-là à l'imagination puissante voient peut-être quelque chose. Peut-être fais-je naître des visions que je ne pressens même pas. (Je ne communique pas, je communique mal : laisse-moi poser mes mains sur ton front et laisser résonner mon rire... ton imagination fera le reste. Puisque je n'aurais rien dit, rien, sinon seulement j'existe. Même si c'est aussi dire que je me laisse exister devant toi, qu'une part de ton regard me façonne).

Alors, évidemment, elle me disait que je m'ouvrais en deux - tout grand - devant ses yeux - pour ses yeux seuls - avec une générosité bien plus grande que tous les autres. Et une préface dit que la mise à nu de la vie intérieure "produit une fascination analogue à celle qu'exerce un film pornographique". Je me livre, me livre, me livre sans entraves quand je me laisse exister de cette manière si nue - livrer les extases de mon être. Mais je ne sais rien d'autre. Une telle grande naïveté dans mes mots et mes aveux.
Quoique tout soit mise en scène, éthos - quoique le temps de notre conversation (et peut être un peu après encore), je sois ta comédienne personnelle, adaptée à tes symboles, tes symboles accordés aux miens, tes symboles incorporés à mon corps, dissous dans les volutes de mes interprétations particulières...
Quand je me forme ainsi, je deviens plus que moi et hors de moi - je me dépossède et m'excède en devenant autre. Inconsistante, je ne suis rien. Je suis. Je m'endors dans vos bras et disparais dans vos chimères : je ne suis pas là, je suis ailleurs. Je suis tant
et tant de bonheur me berce
mais je suis fugace et tout s'efface.

Elle m'a dit qu'il n'y avait rien à comprendre dans le concept de muse, que c'est purement une exploitation. Je suis secouée de rire en songeant que j'ai appelé ces hommes mes muses. (Peut-être que mon art serait de vivre disait Duchamp...) Je me sers de leur imagination. Leur imagination et leurs croyances comblent le néant dans ma tête. Mon incapacité à croire en quoi que ce soit (sauf à la mort et au bonheur) - mais donner vie aux croyances des autres ! Puisqu'elles viennent d'un autre...
Je ne l'ai pas voulu - mais mon maniement des symboles a tissé une toile autour de lui. Il a mis feu à mon corps, y a fait couler la lumière et j'ai traduit cet embrasement avec des mots. Des mots accordés, adaptés aux siens, nés de ses idées mêmes. Le labyrinthe était obscur et moi j'ai joui follement : les ciels étaient d'or pur.
Je n'y ai pas pensé : les mots se sont démultipliés dans sa tête et j'ai déambulé dans ses yeux, c'est-à-dire dans ses rues, pendant des jours bien qu'il sache que je n'étais à ce moment là pas dans sa ville. Il me voyait partout dans les cheveux bruns des autres femmes et moi je ne le voyais nulle part, je ne le cherchais même pas des yeux - puisque je le savais ailleurs. (Et quel besoin encore de lui chez moi, de moi chez lui ?) Avoir ses mots - quant au reste...

C'est de l'exploitation - et des histoires sans histoires. J'ai incarné ses fantasmes - et puis ? N'importe quelle femme se serait sentie humiliée (je crois). Je peux supporter beaucoup de violence, mon corps, mon être s'en abreuvent avec hargne et délectation, mais l'humiliation et l'irrespect ne font pas partie de mon monde.
J'ai incarné ses fantasmes - des myriades de gouttes dorées et glacées sur ses doigts. Mes baisers brûlants et vifs comme un goût de sang, je veux dire de cendre. Il a baisé l'image de moi qu'il a faite vivre et ce n'était qu'une image - et puis après ? Et c'était pourtant tant et tant de coups et d'éclats et de frissons et de voluptés. Mais il a pris ses doigts dans la toile, a tiré les ficelles
Moi je sens tout mon corps soupirer d'aise, de désir - oh comme je vis !
le ciel se défait mais le corps est bien là - la jouissance réelle. [...]

(Quant à l'onanisme littéraire - mais quel délire, mais quel délice).
Ma soutenance s'est hyper bien passée ! (par contre je suis restée 1h40 avec ma directrice de mémoire - c'est énorme)
et maintenant j'ai envie de travailler sur cette histoire de "sublime sexuel" et je viens de relire Lenore Kandel que je lorgne depuis pas mal de temps et c'est toujours aussi magnifique
(Quand j'aurais rien à faire, je traduirais ses poèmes pour moi - même si l'anglais est toujours plus beau quand je le lis que le français)
(je suis aussi en train de lire le journal de Mary MacLane et c'est absolument une dinguerie - même si rien à voir avec ce dont je viens de parler, simplement je le lis en français parce que j'ai pas eu envie de dépenser 13 euros de plus pour la version original sachant que je me suis ruinée avec les livres de l'agreg... - et je pense qu'en vo c'est encore plus génial !)
Mais si tout se passe bien j'ai deux ans à attendre (à faire d'autres choses) ce qui me laisse le temps de lire le tchèque et de changer d'avis donc on verra !
Il y a des oiseaux qui habitent dans un renfoncement du toit de l'immeuble d'en face, exactement à la hauteur de ma fenêtre, et j'entends les bébés gémir et je fonds, mon cœur se brise : c'est si adorable ?!

Comme j'aime les oiseaux ! (Les corbeaux et les pies en premières lignes. Mais voir les oies du parc aussi, quelle beauté, et puis les merles !)
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