J'ai l'intention de reprendre (en fait organiser pour de vrai) mon journal de rêves !

Les rêve ont longtemps constitué une partie de mon identité. Depuis que je suis en primaire en tout cas, j'ai pris l'habitude d'y faire attention et d'en raconter certains. (O. me disait qu'elle se souvenait beaucoup plus de ses rêves depuis que je lui parlais des miens. Je pense à Perec qui disait qu'il finissait par rêver pour écrire ses rêves : d'une certaine manière O. s'en souvenait pour me les raconter).
Ce n'est pas tant l'interprétation qui m'intéresse que cette impression de mener une autre vie, parallèle à la vie réelle, où tout est possible, où nous expérimentons jusqu'à ce qu'on ne peut même pas imaginer consciemment. (Cet au-delà de l'imagination ?)
Et tout ce symbolisme, les significations cachées, voilées : une poésie visuelle. C'est une euphorie, de pouvoir "entrer dans un poème" au sens fort. Puis ce n'est pas seulement une poésie visuelle, mais une expérience du sensible totale. J'y pense : une solution à cet écueil que je trouve dans la littérature, qui est qu'elle déréalise le sensible. Ecrire les rêves, ce serait comme boucler la boucle, contempler un objet qui se déploie à la fois dans le sensible et le langage.
Et puis, bien sûr, le rêve, palliatif de la vie manquée...

Pourtant, depuis quelques années maintenant, mes rêves ont perdu de leur magie et je ne fais plus l'effort de m'en souvenir. Je veux des rêves qui soient des apothéoses, des épiphanies : ah oui, les quelques diamants dans un tas de banalités.
Et à la fin j'aurais vécu deux, ou trois fois.