« Pour sûr, ce n'était pas un garçon facile. Il s'emportait rapidement. C'est bien simple, il ne supportait pas la moindre critique ; du coup, il fallait faire attention à tout ce qu'on disait. J'étais son entraîneur et les gars me reconnaissaient une certaine autorité : quand je donnais une consigne, ils avaient foutrement intérêt à la respecter. Il valait mieux pas me marcher sur les pieds, avec Jimmy, pourtant, je prenais des pincettes, j'avais toujours peur qu'il se vexe. Vous savez, il était capable de tout envoyer balader, juste pour une remarque déplacée ou parce qu'il estimait que l'arbitre était vendu à l'adversaire. Et quand il piquait une colère, on ne le revoyait plus pendant des jours. Et ça ne servait à rien de le raisonner. Il n'en faisait qu'à sa tête. Vous me direz que j'aurais pu l'exclure ou me débrouiller sans lui, mais on ne se passe pas de son joueur le plus fort. 
[...] Bon, il faut reconnaître que c'était un sportif, il avait fait de l'athlétisme, du base-ball. Cela, quand on me l'a amené la première fois, j'aurais pas parié un dollar sur lui. 
Sauf que c'était le meilleur marqueur de l'équipe. Avec lui, on gagnait. Sans lui, on se faisait rétamer. Point. 
Il avait le sens du terrain, il savait se faufiler jusqu'au panier, il esquivait incroyablement, il était très rapide. Et surtout, il avait l'esprit de compétition. Je n'ai jamais vu un acharné pareil. Et teigneux, comme je vous l'ai expliqué.
J'ai longtemps cru qu'il compensait, qu'il était complexé par sa taille et qu'il se forçait à en faire davantage que ses camarades. Mais non. Il était fabriqué comme ça, c'est tout. »
- Philippe Besson | Vivre vite