J'aime Dolly. Ce n’est pas parce qu’elle est inculpée dans un meurtre sanglant que je ne l’assume pas. Je l’aime car c'est – et cela va vous paraître étrange, chers lecteurs de première main - avant tout, un être sensible et léger, ce n'est pas de sa faute si sa nature lui impose de ne pas coller à la logique de cette terre. Il est vrai que je ne la verrai pas souvent, à la vitesse à laquelle nous avançons. Je ne la mets pas dans la confidence de mes craintes, de peur qu'elle s'affole et qu'elle ne déguerpisse de la voiture en piétinant, pieds nus, sur les traces de roues que nous avons imprimés sur l'asphalte rendu luisant par la lumière des phares, et la pluie drue, mais je doute que nous puissions semer les flics et ce malgré nos journées d'avance et nos combines plus efficaces que celles des évadés dans Prison Break. Nous finirons tôt ou tard, par nous faire coincer au tournant d'une ruelle quelconque, d'une ville quelconque. C'est triste de savoir que nos destins sont scellés. Nous serons happés, mis à terre sous la menace des kalash, des fusils d'assauts et nous serons plus que jamais, dangereusement, dans l'obligation de renoncer à nôtre amour... 
Je regrette de ne pas avoir connu Dolly sous un autre jour. Sans le meurtre, sans les combriolages, sans les courses poursuite. Nous aurions été des amis d'enfance que nous serions devenus inséparables. Nous aurions grandis sans peine, l'un-à-côté de l'autre et je serai devenu autre chose qu'un scénariste désabusé noyant sa carrière dans l'alcool. Elle aurait illuminé mes nuits tant que j'aurai illuminé les siennes. Dolly a cette tendance au détachement que j'apprécie beaucoup, l'esprit perpétuellement accroché sur un lambeau de ciel. Des fois, elle me fait croire qu'elle pèse moins lourd qu'une plume. L'oeil avide de connaissances oubliées et de secrets occultes, Dolly est une mordue de lecture, elle me raconte ses découvertes qu'elle enregistrait avec un magnétophone, cloisonnée dans sa chambre, le corps enfoui sous un drap. Elle cherche à comprendre ce que nous étions réellement avant d'être là dans la bagnole, nos origines lointaines. Elle a un coeur qui au premier coup d'oeil vous lance des éclairs froids et indélicats mais une fois pratiqué on ne incision, on le sens palpiter au gré des émotions profondes et des sensations pures.